Dépression : Prévenir et soigner avec la technologie
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Dans le cadre de notre service de veille, Unitec vous propose régulièrement des ensembles d’articles thématiques pour décrypter les grands sujets de l’innovation. Cet article, rédigé par Alexandre BERTIN responsable de la veille à Unitec et Maxime MATHOMAT, étudiant en Master 1 Conception de projet numérique et multimédia à  l’ ISIC – Université Bordeaux Montaigne, est dédié aux technologies permettant de prévenir et soigner la dépression.

 

Prévenir la dépression à l’aide de la technologie.

Depuis près d’un an, la France et le monde dans son ensemble vivent au rythme des confinements successifs plus ou moins drastiques, en fonction des politiques nationales de santé publique, liés à la pandémie de coronavirus. Cette pandémie qui, au 1er janvier 2021, a touché plus de 85 millions d’habitants et fait près de 2 millions de morts a révélé ou exacerbé certaines pathologies mentales : anxiété, angoisse, dépression touchent désormais, selon les autorités sanitaires, de plus en plus de monde. Afin de mesurer l’impact de la crise sanitaire inédite, Santé Publique France a mis en place, dès la fin du mois de mars 2020, une grande étude (CoviPrev) permettant de suivre l’évolution des comportements (gestes barrières, confinement, consommation d’alcool et de tabac, alimentation et activité physique) et de la santé mentale (bien-être, troubles). Les résultats sont sans appel : le premier confinement s’est caractérisé par une très forte augmentation des troubles du sommeil, des états anxieux et dépressifs. Le deuxième confinement confirmant ces résultats.

Face à cette explosion qui s’ajoute à un nombre important de malades chroniques (1 personne sur 5 serait touché par la dépression au cours de sa vie selon l’OMS), les solutions médicamenteuses restent, à ce jour, les plus efficaces. Pourtant, elles ont parfois des limites : résistance, effets secondaires, difficultés à suivre son traitement, etc.

Bonne nouvelle, de nouvelles technologies s’avèrent prometteuses à la fois pour prévenir la dépression mais également pour la soigner lorsqu’elle est identifiée. Découvrons ensemble les principales tendances !

 

Les thérapies en réalités virtuelles

L’objectif de la TERV  (Thérapie en réalité virtuelle) est de confronter le patient à ses peurs, à travers la réalité virtuelle. Bien qu’encore peu utilisée pour traiter la dépression, elle est très efficace contre les phobies, les addictions et autres troubles anxieux. Equipé d’un casque de réalité virtuelle sur les yeux, le patient est guidé par le thérapeute dans des environnements en 3D qui vont l’exposer à sa source d’anxiété. Il y a tout un travail avec le thérapeute pour arriver à mieux faire comprendre au patient son trouble et à désactiver son hypervigilance ainsi que certains mécanismes de défense.

La TERV est une vraie alternative thérapeutique car elle est moins brutale et beaucoup plus facile à mettre en place qu’une thérapie classique. La TERV permet un meilleur contrôle, ainsi qu’une confrontation progressive à ses propres peurs afin de réellement les soigner et pas les renforcer.

Crédit photo : Neozone.org

L’approche est ludique et très efficace avec un taux de réussite avoisinant les 90%. Si peu de centres de psychothérapie en disposent en France, ce ne sera probablement pas longtemps le cas avec la baisse des couts du matériel (également disponible au grand public). Oxford VR startup anglaise spécialisée dans les thérapies en réalité virtuelle pour les troubles psychologiques a levé plus de 12 millions de dollars en début d’année 2020 pour développer ses solutions thérapeutiques à base de réalité virtuelle.

 

Quand votre montre … en sait plus que vous !

Sans surprise, l’Intelligence Artificielle révolutionne aussi la santé mentale. La société Myndblue, créée en 2015, a mis sur le marché un bracelet connecté permettant de prévenir la dépression. Il permet de distinguer la déprime de la dépression afin d’améliorer la prise en charge de la maladie. En effet, selon la Haute autorité de santé environ 40 % des personnes souffrant de dépression en France ne sont pas prises en charge. Lors d’une dépression, il y a une anomalie de distribution de l’information entre certaines zones du cerveau, ce qui a un impact psychique mais aussi physique. De cette façon, le bracelet connecté récolte les données comportementales et physiologiques du porteur, telles que le rythme cardiaque, la température du corps, la tension artérielle, le temps de sommeil, l’équilibre au réveil, ou encore l’acidité de la peau. Ces données « sont analysées, en temps réel, par notre système d’IA qui envoie un rapport au psychiatre sur son état présent et précis. Il peut ainsi anticiper les situations critiques et ajuster le traitement. » explique Denis Fompeyrine, à la tête de Myndblue. Cependant, il précise que cet outil ne révolutionnera pas la prise en charge tant le domaine de la dépression est vaste et complexe.

 

IWAKU, le réveil qui prend soin de vous !

Iwaku pour « I wake you » est un réveil qui permet d’éviter la dépression. Il se charge du monitoring du cycle de sommeil et calcule la durée de sommeil optimale de son propriétaire. L’appareil contrôle la qualité du sommeil de son porteur grâce aux capteurs de mouvements intégrés du smartphone auquel il est connecté. Il intègre également une lumière progressive avec intensité et spectre adaptable. Il fait enfin office de lumino-thérapeute, une pratique qui permet de lutter contre l’insomnie et la déprime saisonnière.

 

La technologie : alternative au médicament ?

Stimulation magnétique transcrânienne : l’alternative aux médicaments

Cette technique récente permet de rééquilibrer l’activité électrique du cerveau, dérégulée par la maladie. Des électrodes sont attachées au niveau du crâne afin qu’elles envoient un faible courant électrique alternatif sur les ondes d’une zone précise du cerveau. Le courant électrique va alors amplifier, diminuer ou synchroniser les ondes. Le traitement s’étend sur 5 à 6 semaines à travers des séances de 30 minutes.

7 personnes sur 10 voient la sévérité de leurs symptômes diminuer de moitié à peine 15 jours après le traitement. Il doit être effectué en complément d’un suivi régulier et d’une psychothérapie.

L’efficacité de la SMT serait ainsi deux fois plus efficace que les antidépresseurs. Son efficacité s’étend à de nombreuses autres pathologies comme les addictions, les troubles anxieux et obsessionnel compulsif etc… En 2018, on dénombrait 32 centres équipés de cette technologie.

 

Quand le mal est fait, le mal n’est plus ! avec la RCAO

La remédiation cognitive est utilisée depuis longtemps, mais est depuis peu combinée à l’usage de l’ordinateur (on parle alors de remédiation cognitive assistée par ordinateur). Elle vise à stimuler à travers des exercices des capacités cognitives déficitaires comme la mémoire, l’attention et des fonctions exécutives, après plusieurs épisodes dépressifs. « RECOD », c’est le nom d’un de ces logiciels de remédiation cognitive spécifiquement adapté aux personnes déprimées. Il ne remplace pas l’action du thérapeute, il la complète. Bien que l’intégration du numérique est encore récente dans la remédiation cognitive, son efficacité est avérée et tend à se rependre.

 

Le grain de sel d’Elon Musk

En juillet 2020, Elon Musk a présenté lors d’une conférence de presse son dernier projet : Neuralink.

L’ambition folle de cette technologie est de connecter le cerveau humain à une machine grâce à un implant, afin de soigner un certain nombre de pathologies du cerveau. Parmi elles, l’addiction et la dépression. Ce ne serait pas une solution long terme mais temporaire, afin de prendre le temps de trouver un traitement adapté. Nous n’en savons pas plus pour le moment…

 

Tricky : le jeu pour prévenir la dépression

Si les outils technologiques les plus innovants sont en cours de développement dans les centres de recherche et les grandes entreprises technologiques, d’autres acteurs, de plus petite taille, proposent des solutions beaucoup plus proches des malades. C’est par exemple

la start-up Tricky qui utilise l’escape game – très en vogue actuellement – pour alerter les gens sur les symptômes liés à la dépression. L’idée est de s’amuser tout en s’informant. Le jeu a été testé à l’Université de Poitiers en octobre 2020 dans le cadre d’une opération de prévention des situations de dépression. Compte tenu de la situation sanitaire mondiale et des dangers que représente l’isolement chez les étudiants, l’escape game proposé par Tricky devrait trouver rapidement d’autres universités intéressées.

Les nouvelles technologies nous réservent donc encore bien des surprises à l’avenir !

Il est important de rappeler que ces alternatives ne remplacent pas l’accompagnement thérapeutique ! Une approche humaine est nécessaire, d’autant que l’homme reste aujourd’hui le plus à même de comprendre ces maladies complexes.

 


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avril 9, 2024