Parcours de soins : le tournant numérique (1/2)
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A l’instar de l’ensemble des pays développés, la France fait face à de grands défis démographiques, économiques et sanitaires. Population vieillissante, augmentation des maladies chroniques, explosion des cas de maladies cardiovasculaires et cérébrales, obésité, creusement des inégalités face aux soins mais aussi dans l’accès aux soins avec le développement des déserts médicaux en zones rurales.

La crise sanitaire que nous vivons depuis plus d’un an a mis en lumière les dysfonctionnements d’un système de santé réputé l’un des plus fiables et des plus égalitaires au mondeL’état d’urgence sanitaire déclaré à plusieurs reprises depuis le 13 mars 2020 aura eu, outre un impact direct sur le ralentissement de la propagation de l’épidémie de covid-19, comme conséquence d’accélérer la transformation du système de santé comme jamais auparavant. Si les germes de cette transformation datent de la Loi de Modernisation du Système de Santé promulguée en 2016 sous la houlette de Marisol Touraine (et plus particulièrement sur ses trois piliers d’innovation), il est indéniable que depuis l’apparition du nouveau coronavirus, les outils numériques mis à disposition du corps médical et des patients connaissent un succès phénoménal. Ils permettent, notamment, de recourir à des services à distance jusque-là sous-exploités en faisant « sauter des verrous culturels » notamment. 

Ce sont ces enjeux que nous présentons dans une première partie qui s’attachera également à revenir sur une définition des termes utilisés dans l’univers de la e-santé. Dans une seconde partie, nous présenterons comment les outils numériques et technologiques s’articulent avec le parcours de santé des Français. 

parcours de soins - entrée dans la modernité
Partie 1 : en cours de lecture
parcours de soins part 2
Partie 2 : cliquez pour voir

Partie 1 : L’entrée dans la modernité 

L’Etat au chevet du secteur de la santé 

Le système de santé français est à la croisée des chemins et les gouvernements successifs depuis le début des années 2000 font face à de grands défis nécessitant la prise de décisions radicales. Faisant suite à la loi de modernisation du système de santé de 2016, la stratégie Ma santé 2022, annoncée par le Président Emmanuel Macron et la Ministre de la Santé (de l’époque) Agnès Buzin, pointe un système aujourd’hui inadapté aux réalités sociales, économiques, territoriales et sanitaires de la France. Pour répondre aux grands enjeux, la stratégie nationale repose sur cinq chantiers prioritaires : qualité des soins et pertinence des actes, organisation territoriale, mode de financement et de régulation, ressources humaines et formation et enfin numérique. 

L’un des objectifs affichés est de repositionner le patient au cœur des soins en axant la stratégie sur le parcours de soin (nous y reviendrons dans la deuxième partie de cette note de veille). Pour cela, l’usage des nouvelles technologies devient un des piliers essentiels de la réforme.  

La révolution numérique en quelques mesures clés de Ma santé 2022  

    • Ouvrir un espace numérique de santé à destination de chaque Français d’ici janvier 2022  
    • S’appuyer sur le numérique pour améliorer les organisations, dégager du temps médical et offrir un bouquet de services numériques aux professionnels de santé  
    • Ouvrir l’hôpital (programme HOP’EN) et les territoires de santé (programme e-Parcours) sur le numérique  
    • Favoriser la production et l’utilisation des données de santé  
    • Constituer une commission de l’éthique numérique en santé  
    • Encourager l’innovation en e-santé 
  • Source : https://solidarites-sante.gouv.fr/systeme-de-sante-et-medico-social/masante2022/article/recourir-au-numerique-pour-mieux-soigner  

La feuille de route « accélérer le virage numérique de la santé » issue de la stratégie précédente précise les jalons nécessaires à la modernisation du système de santé : 

  1. Renforcer la gouvernance du numérique en santé 
  2. Intensifier la sécurité et l’interopérabilité des systèmes d’information en santé  
  3. Accélérer le déploiement des services numériques socles 
  4. Déployer au niveau national des plateformes numériques de santé 
  5. Soutenir l’innovation et favoriser l’engagement des acteurs 

Focus sur G-nius : le lab e-santé du Ministère de la Santé 

Résultat de l’action 23 de la Stratégie Ma Santé 2022, G_NIUS est le guichet national de l’innovation et des usages en e-santé. Véritable facilitateur de l’innovation en santé numérique, il est le fruit d’un travail collectif entre la délégation ministérielle au numérique en santé (DNS), l’agence du numérique en santé (ANS) et en partenariat avec Bpifrance. G_ NIUS reste bien entendu ouvert à tous les acteurs institutionnels souhaitant apporter leur contribution. G_NIUS oriente, informe et met en relation l’ensemble des acteurs de la santé numérique pour faciliter l’innovation collective et valoriser les réussites de terrain, aujourd’hui très nombreuses. Les innovateurs sont ainsi guidés pour trouver rapidement la bonne information, le bon interlocuteur, tel une boussole G_NIUS leur simplifie la vie par des services simples, évolutifs et ouverts à tous. 

 G_NIUS s’attache à apporter immédiatement des services facilitateurs aux éditeurs : 

  • la boite à outils recense les outils conçus par les différents acteurs institutionnels face à la crise ; 
  • la vitrine de la e-santé répertorie les espaces de recensements généralistes et thématiques utiles à la bonne diffusion des solutions numériques COVID-19 ; 
  • l’info financement permet aux éditeurs de retrouver les sources de financement françaises et européennes pour concrétiser leurs projets innovants. 

Source : https://gnius.esante.gouv.fr/  

Enfin, après 50 jours de concertation avec l’ensemble des partenaires, le rapport final du Ségur de la Santé, remis par Nicole Notat au Premier Ministre Jean Castex en juillet 2020, propose une série de recommandations portant sur la modernisation du secteur de la santé dont un axe sur l’amplification du recours à la téléconsultation qui a connu, lors de la première vague du coronavirus, une forte augmentation de son utilisation. 

Télémédecine, téléconsultation, télé-expertise : de quoi parle-t-on ? 

Toutes ces réformes, ces textes de loi, ces préconisations font référence, entre autres, à un cadre idéologique, celui de la e-santé. Afin de s’y retrouver et de comprendre l’articulation de tous les concepts appartenant à ce cadre, il est nécessaire de revenir sur les définitions.  

Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), la e-santé « recouvre un vaste domaine d’application des technologies de l’information et de la télécommunication (TIC) au service de la santé ».  

Elle recouvre, d’une part, les systèmes d’information de santé ou hospitaliers (SIH) sur lesquels reposent, entre autres, le Dossier Médical Partagé (DMP) et le système de carte vitale, et d’autre part l’utilisation des TIC dans des processus logistiques (robots pharmaceutiques, puces…) et médicaux. En ce sens, selon la FNEHAD, la e-santé recouvre des champs d’application plus récents comme :  

La télésanté qui regroupe :  

La télémédecine, propre aux professionnels médicaux (médecins, sages-femmes, chirurgiens-dentistes) est « une forme de pratique médicale à distance fondée sur l’utilisation des technologies de l’information et de la communication. Elle a pour objectif d’améliorer l’accessibilité à l’offre de soins (notamment dans les territoires fragiles) et la qualité de vie des patients en permettant une prise en charge et un suivi sur leur lieu de vie. » 

Le télésoin est « une pratique de santé qui consiste à effectuer des soins à distance grâce aux technologies de l’information et de la communication. Il met en relation un patient avec un auxiliaire médical, ou un pharmacien » ; 

La m-santé, définie comme « le déploiement de la technologie mobile dans le domaine de la santé » et recouvrant les applications et objets connectés au service de la santé.  

La coordination à distance via les outils numériques pour faciliter à la fois le partage d’informations entre les professionnels et établissements de santé (ex. : échange de résultats, dossier partagé, DMP), et le parcours de soins des patients (ex. : les rendez-vous en ligne). 

→ Le recours aux big data médicales et à l’intelligence artificielle pour faciliter le diagnostic médical, la prise de décision thérapeutique et la recherche clinique.  

Plus particulièrement, la télémédecine regroupe :  

→ La téléconsultation qui permet à un professionnel médical de donner une consultation à distance par l’intermédiaire des outils numériques modernes. C’est un acte médical et une action synchrone (patient et médecin se parlent). Elle permet au professionnel de santé médical requis de réaliser une évaluation globale du patient, en vue de définir la conduite à tenir à la suite de cette téléconsultation ;  

→ La téléexpertise permet à un professionnel médical « requérant » de solliciter à distance l’avis d’un ou de plusieurs professionnels médicaux « requis » par l’intermédiaire des technologies de l’information et de la communication. C’est d’abord un acte médical et une action asynchrone (l’échange a lieu par écrit). Cela concerne deux médecins pendant ou à distance de la consultation initiale. Il existe deux types de téléexpertise :  

  • La téléexpertise de niveau 1 : avis donné sur une question circonscrite, nécessitant l’analyse de documents en nombre limité (photos, résultat d’examen complémentaire isolé, données cliniques…) sans nécessité d’étude approfondie d’une situation médicale (ex. : lecture d’une rétinographie, étude d’une spirométrie, lecture de photos de lésions cutanées pour le suivi d’une plaie chronique d’évolution favorable…) ;  
  • La téléexpertise de niveau 2 : avis circonstancié donné en réponse à l’exposition d’une situation médicale complexe après étude approfondie et mise en cohérence, correspondant à l’analyse de plusieurs types de documents (ex. : suivi d’une plaie chronique en état d’aggravation, adaptation d’un traitement anti-épileptique, bilan pré-chimiothérapie lors de son initiation…) ;  

→ La télésurveillance permet à un professionnel médical d’interpréter à distance des données recueillies sur le lieu de vie du patient ;  

→ La téléassistance a pour objet de permettre à un professionnel médical d’assister à distance un autre professionnel de santé au cours de la réalisation d’un acte ;  

→ La régulation est la réponse médicale apportée dans le cadre de l’activité des centres 15. 

Afin de rendre plus clair l’articulation des solutions numériques en matière de e-santé, la Haute Autorité de Santé à établi un classement en 4 catégories, contenant 11 types de solutions.

Les 4 catégories sont distinguées comme suit : 

  • Niveau A : Services support aux patients, aux aidants ou aux professionnels dans le cadre de soins ou d’optimisation du parcours de soins ou de gestion médico/socio-administrative sans action directe sur la santé des patients. 
  • Niveau B : Information générale de l’utilisateur non personnalisée sur les conditions de vie, les règles hygiéno-diététiques, les pathologies/handicaps ou tout état de santé (au sens large du terme), les parcours de santé, de soins ou de vie, etc. Fournit également des supports ou outils de formation aux professionnels de santé. 
  • Niveau C : Aide à la vie, à la prévention, au dépistage, au diagnostic, à l’observance, à la surveillance ou au traitement d’une pathologie, d’un état de santé ou dans le cadre d’une situation de handicap, sans autonomie de la solution numérique dans la gestion de la décision thérapeutique. Ce niveau comporte, à lui seul, 8 catégories selon les diverses fonctionnalités des solutions de ce niveau.  
  • Niveau D : Gestion autonome de la décision après analyse des données et diagnostic afin d’ajuster automatiquement, le traitement à administrer, sans intervention humaine » 

Continuer ma lecture vers la partie 2

parcours de soins part 2

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avril 9, 2024